Le Jardin de thé

Le Jardin de thé est un outil indispensable à la bonne portance de la cérémonie du thé. Il est en effet indissociable de cette dernière selon l’esthétisme définit par Sen no Rikyu, le maître de la cérémonie du thé. Un aménagement paysager particulier est nécessaire à sa parfaite expression, nous allons voir dans cet article, ses origines, ses dispositions, et les enseignements de son fondateur. 

Sen no Rikyū par Hasegawa Tōhaku

Genèse de la naissance du Jardin de thé.

A la fin du Moyen-Age japonais, deux courants distincts s’affrontent dans l’esthétique. Un fondé sur l’opulence et la richesse décorative initié par les daimyos. Un autre fondé sur le raffinement et la sobriété. Un nouveau style de jardin apparaît, fondé sur l’art du thé, Wabi cha. C’est le développement du concept de Wabi – Sobriété.

La naissance de l’art du thé.

Durant les époques de Muromachi et Momoyama, le monde politique utilisa l’art pour asseoir son prestige et son pouvoir. Les shoguns se faisant bâtir des châteaux et résidences richement ornés et décorés. En contre balance de cela, les moines, et les marchands, commencèrent à privilégier le Wabi, la sobriété.

Note : la cérémonie du thé se nomme indifféremment en japonais : « cha no yu », « sado », « chado ».

Le thé fut introduit au Japon dès Nara, mais son usage s’est répandu bien plus tard. On prête au moine Eisai, au début de l’époque de Kamakura, l’importation d’une nouvelle variété de théier, que l’on nomme Honcha jusqu’à aujourd’hui.

A son début, la cérémonie n’en était pas une. On l’a nommé Tocha, et elle était l’initiative des seigneurs importateurs de produit et d’art du continent chinois. Le thé était un prétexte de rassemblement pour vendre et présenter les nouveaux produits venus de Chine aux invités.

Le moine Murata Juko fut le premier à injecter l’esprit du zen à la réunion pour lui insuffler une forme d’art. Il fut suivi par Takeno Joo, qui inculqua les notions de sobriété et de frugalité à son disciple Sen no Rikyu.

La recherche esthétique purement japonaise.

A lire – Kenya Hara / esthétique du vide – Ma

Le style « sobre » apparaît au Japon au milieu du XVe siècle. Au moment où le monde se pourvoit dans la démonstration et l’exposition des formes élaborées post-renaissance Européenne, le Japon se retire pour se redéfinir.

En la personnification du Japon, se cache en réalité le shogun Ashikaga Yoshimasa – à étudier très sérieusement pour les avides d’esthétique japonaise. Après la violente guerre civile du Onin, ce dernier se retire au profit de son fils. Las de la guerre, et un sens esthétique aiguisé, il va se retirer à Kyoto, dans le quartier de Higashiyama. Après la construction d’une maison reflet de ses goûts, il va consacrer le reste de sa vie à l’étude esthétique.

Un goût pour la simplicité et la quiétude va se développer chez lui. Jusqu’à présent largement influencé par l’étranger, principalement la Chine, le Japon va se redéfinir dans le jardin du shogun à la retraite. 

En parallèle du développement du bouddhisme Zen, et de la création des jardins secs (karesansui).

Parmi les compagnons que l’ancien Shogun engage pour leur qualité sans égard à leur rang on trouvera :

  • Ryuami, fondateur de l’Ikebana.
  • Zen’ami, paysagiste.
  • Noami et son petit-fils Soami qui compilèrent le Kundaikansochoki, le livre des secrets de l’art chinois et l’art de la décoration.
  • Kan’ami et son fils Zeami qui élaborèrent la forme actuelle du théâtre No.

Sen no Rikyu portera la cérémonie du thé à des sommets de raffinements, l’utilisation des produits coûteux d’importation fut abandonnée pour des ustensiles ordinaires, et les cérémonies avaient lieu dans un modeste toit de chaume.

Afin de porter le Wabi-cha plus loin, les maîtres de thé eurent besoin d’un nouveau type de jardin conforme à leur exigence, et à leur sobriété. Un jardin de thé, dédié, qui obéirait à un ensemble de besoin pour la réalisation parfaite de la cérémonie du thé.

Le jardin de thé

A la suite de l’émergence du jardin sec, la cérémonie de thé va rechercher le Wabisabi. Sous la houlette de Sen no Rikyu, l’esthétisme le plus fondamental va être atteint et c’est ce dernier qui va être le garant de la cérémonie de thé jusqu’à aujourd’hui.

Le jardin de thé a à partir de Sen no Rikyu a pour fonction d’être une jonction entre le monde profane, à l’extérieur du portique d’entrée au jardin de thé, et le monde « sacré » de la cérémonie du thé.

Kosoan Jardin, Tokyo, par lady Iron chef

Le roji (chemin vers la maison de thé).

Les maîtres de thé surnomment le jardin de thé, le roji, qui signifie le chemin. Le jardin est conçu dans la seule optique de permettre à l’invité le passage entre un monde de préoccupation mondaine et celui de la cérémonie du thé.

Ainsi, les espèces végétales qui sont sélectionnées dans le jardin appartiennent à la montagne, et les arbustes ne sont pas des arbres à fleur. Le jardin cherche à offrir le calme profond et la sérénité qui règne dans les forêts de montagne sans distraire le visiteur de quelques fleurs.

Au milieu règne un chemin, véritable essence de création de l’architecte, fait de pierre qui permet de se frayer un passage au milieu du zoki. Certains éléments, comme les pas de pierre, tobi ishi, et les lanternes en pierre, ishi doro, furent ajoutés d’abord récupérer à partir de celles des cours de temple puis créer dans la seule utilisation des roji. Ils furent utilisés pour la première fois par les maîtres de thé au XVIème siècle.

Le parcours de thé doit reproduire le parcours de la ville à la cabane d’un ermite en miniature.

  • La porte d’entrée.
  • Les toilettes.
  • Le banc d’attente, permettant de contempler et de se préparer à la cérémonie.
  • La chumon, ou porte intermédiaire.
  • La fosse à déchet. Chiriana.
  • Bassin aux ablutions, tsukubai.
  • Puits, ido.
  • Pavillon de thé, soan.

Selon les recommandations de Sen no Rikyu « le roji idéal contient six parts de parcours pour 4 de paysage ».

Pénétrer dans l’espace de la cérémonie revêt une compartimentation des étapes. Une fois la porte d’entrée ouverte, venant de la rue, ou d’un jardin plus grand, le dernier des invités se doit de la refermer. C’est la première étape de séparation avec le monde de l’extérieur. Ici, l’invité doit se laisser pénétrer par l’esprit de la cérémonie à venir. A cet effet, un banc d’attente est mis à disposition. Ce banc permet de voir le passage des saisons, et de prendre patience. Une végétation environnante retranscrit les saisons si besoin était.

Lorsque votre hôte vient vous cherchez, il s’incline, et vous en faites de même. Avant de passer une seconde porte, la porte médiane, ici se trouve le chiri ana qui est une fosse, dans laquelle vous devez, symboliquement, laissés vos soucis pour pouvoir pénétrer pleinement l’atmosphère de la cérémonie.

Avant de parvenir à l’espace de la cérémonie du thé, une dernière porte basse, nijiri guchi, qui vous oblige à vous baissez doit être traversé. C’est là que les samurai étaient contraints de déposer leurs armes et d’être l’égal des autres à l’intérieur du soan, à une époque de stricte différenciation entre les classes sociales.

Bien qu’avant lui, de grands jardiniers se soient attelés à définir ce qu’était l’art du thé, et l’art de son jardin, c’est sous Sen no Rikyu que ce dernier a été finalisé et qui demeure aujourd’hui comme l’exemple à suivre. Afin de définir la nature véritable du jardin de thé, ce conte explique comment le jardin doit être traité.

 Sen no Rikyu et son disciple. 

Le disciple en effet prenait sa tâche très à cœur, et il nettoyait chaque centimètre du jardin avec une précision et une ténacité importante mais à chaque fois qu’il demandait au maître si cela convenait ? Le maître répondait que c’était loin d’être parfait. Après plusieurs jours du même serment, le maître finalement s’attela à montrer ce qui n’allait pas à son disciple. D’un geste assuré il remua avec vigueur les branches des arbres, les feuilles d’automne, d’un rouge étincelant, tombèrent sur le roji, à la lueur dorée. Le maître s’en félicita et dit :

Les feuilles de chênes
Rougies de l’automne
Tombent, sont entassées sur le sentier
D’un vieux temple montagnard
Comme ce chemin est solitaire !

Le roji est en effet, si petit soit-il, doit permettre d’arriver à la cabane d’un ermite via un chemin montagneux. Du monde profane, au monde de la voie du thé. Ainsi est la fonction du jardin de thé.

 

Maison de thé

En tea house = http://www.teaceremonyen.com/ – (source image)

Ichiriki Chaya – http://www.asahi-net.or.jp/~mf4n-nmr/itiriki.html#mark00

Okitsu Club – http://www.okitsu-kyoto.com/english/history/index.html

Ran Otei – Camellia

Source The culture Trip 

 

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