Guillaume Tauveron | Interview

Réalisateur, photographe, metteur en scène, monteur, Guillaume Tauveron est à l’image des artistes du 21e siècle qui avec peu de moyens vont au bout de leur rêve, et de leur passion. La sienne : le Japon. C’est dans le documentaire qu’il a réalisé : “Ce Japon qu’on aime tant” qu’il nous a été donné de le découvrir. Portrait de l’artiste, de son regard sur le Japon et sur les japonais, et de ses explications son dernier documentaire.

Guillaume Taveron au comiket

 

Pourrais-tu te présenter tout d’abord pour nos lecteurs qui ne te connaissent pas encore ? 
Bonjour à tous, je suis un des rares Nippovergnats, un ours des montagnes auvergnates atteint d’une sensibilité japonaise. Je suis tombé amoureux du pays via les films de l’âge d’or du cinéma japonais et aussi des plus récents comme ceux de Takeshi Kitano, Kiyoshi Kurosawa et Eiji Okuda.

 

Concernant ton documentaire, qui a dépassé les 40.000 vues sur Youtube, quels ont été les moyens / medias / collaboration mise en oeuvre pour sa réalisation ? 
Alors le documentaire est à la base une idée de Claude Yoshizawa du Centre Culturel Franco Japonais de Toulouse qui est un ami. Nous discutions en fin d’année dernière de mon prochain séjour au Japon et de fil en aiguille le projet est né et Claude s’est alors démené pour trouver le budget nécessaire au projet via différents sponsors et également me mettre en relation avec quelques personnages clés au Japon. Après il m’a laissé carte blanche sur le contenu du film et son traitement.

 

Es-tu content du résultat que tu as obtenu ? 
Je suis surtout content de l’accueil qu’il a eu. De voir tant de personnes apprécier ce film, que cela en motive (ou remotive) certains à faire leur possible pour venir au Japon, que ça donne le sourire à d’autres, je pouvais ne souhaiter mieux. Après, je sais que c’est un film ne reflétant qu’un seul côté du miroir, mais le but n’était pas de parler de certains aspects dur de la société japonaise. Ce qui m’embêtait est que tout ce qu’on voyait du Japon était toujours des images d’un pays froid et introverti, ou alors des excès complètement barrés et limite débiles. Moi, je voulais montrer le Japon chaleureux et humain que je connais pour changer cette image.

 

My own private Predator ©Guillaume tauveron
My own private Predator ©Guillaume tauveron

 

Quels étaient tes objectifs ( artistiques et personnel ) qui t’ont conduit à réaliser ce projet ? 
Ah mince j’ai déjà partiellement répondu à cette question au-dessus. Mais donc ce qui m’intéresse ce sont les gens, et ce sont les stéréotypes et les étiquettes qui cassent le sentiment de proximité entre eux. Je voulais juste montrer qu’aussi étranges soient-ils, les japonais n’étaient pas si différents qu’eux, qu’ils aiment rire, manger, picoler, sortir avec leurs amis, etc… On est à l’époque de la mondialisation mais je trouve que la xénophobie revient de plus en plus partout, au Japon de même, et à l’heure où l’on devrait s’ouvrir le monde se referme de plus en plus. Donc je trouve ça important de focaliser sur les points positifs et qui nous rapprochent plutôt que l’inverse comme le font les médias.

 

Pourrais tu nous expliquer, relater, ta relation avec le Japon ?

Disons que j’ai eu plusieurs Deus ex machina. J’ai rencontré un peintre japonais à un moment particulier de ma vie où j’étais un peu paumé et très loin de mes rêves de réalisateur, et ce qu’il m’a dit m’a fait quitter tout ce que je faisais pour me lancer dans ma voie. Puis

Beyond the blood, 2012
Beyond the blood, 2012

quelques mois plus tard j’ai rencontré le réalisateur Hiroshi Toda avec qui je suis devenu immédiatement ami et avec qui j’ai eu l’occasion de co-réaliser un long-métrage indépendant au Japon dès 2006. Et comme aussi mon but en me mettant à apprendre le japonais dès 2002 était de pouvoir un jour tourner au Japon, j’ai donc tout fait pour avancer sur ce chemin en venant au moins une fois par an et en tournant différentes choses : clips, documentaires, court-métrages… Jusqu’à 2011 où j’ai pu réaliser mon rêve en tournant le long-métrage BEYOND THE BLOOD, avec un casting intégralement japonais. Et je compte bien continuer sur cette voie. Mon prochain film GHOST HEART sera tourné entre la France et le Japon avec un acteur principal japonais.

 

Qu’est ce que ce pays t’apporte personnellement, et artistiquement ? 
Le pays m’apaise. Je ne sais pas pourquoi. Si c’est une certaine image d’épinal liée à des images de zen, cerisiers et autres temples, mais pourtant j’ai passé plus d’un an et demi de ma vie au Japon et j’ai donc passé le stade du Japon de carte postale. Je dis pas qu’à certaines heures de rushs quand je suis concassé entre environ 2000 japonais dans un seul wagon et que tout le monde se bouscule sans s’excuser j’ai pas envie d’en balancer un ou deux sur la voie, mais en dehors de ça il y a une certaine atmosphère qui me détend, et qui me permet donc d’avoir les sens en éveil, car quand on est stressé et énervé les sens se referment. Et donc forcément d’un point de vue artistique il y a beaucoup plus de potentiel. Plusieurs amis m’ont dit que j’étais plus inspiré dans mes images faites au Japon, photos ou vidéos. Et puis Tôkyô est tellement à l’opposé de Clermont-Ferrand, forcément le choc culturel et visuel ne peut qu’inspirer.

 

Qu’est ce que tu aimes le plus au Japon ? 
Je crois que ce sont les japonais en eux même. C’est un peuple vraiment à part, que j’avoue encore avoir du mal à cerner, mais bon plus de trente ans passés en France ne m’empêchent pas non plus de rester ébahi par les réactions de certains… Je sais pas ils ont une gentillesse qui me touche et aussi cette retenue qui ne semble pas toujours facile à gérer. Mais du coup de voir cette retenue se fracasser sur le mur de la complicité et éclatant en moment sincères et précieux je trouve ça beau. Sans doute parce que je partage aussi cette retenue et certains autres traits de caractères (tout en ayant d’autres traits bien français). On se sent proche de ce qui nous ressemble.

 

Quel lieu conseillerais-tu à voir absolument pour nos lecteurs qui vont s’y rendre ? Pourquoi ? 
Quel lieu ? Question difficile… J’en cite un histoire de, mais un des endroits qui m’a le plus marqué a été le temple zen Eiheiji non loin de Fukui. Un lieu reculé mais hautement visité par les japonais. J’ai eu la chance d’y aller un jour hors flux touristique, car sinon allez apprécier un moment de zénitude au milieu de 10.000 personnes (ou alors si vous y arrivez vous avez plus besoin d’aller dans les temples pour la trouver). Sinon dans les montagnes de Nagano, après avoir marché plusieurs heures dans les bois plein de macaques (qu’il faut pas trop regarder droit dans les yeux pour pas les énerver), on est arrivé dans une source chaude naturelle à 40-50° juste au bord d’une rivière glacée. Là c’était le pied !

 

Vue sur le temple eihiji
Vue sur le temple ei-heiji

 

Enfin la question qu’on ne manque plus sur le site du Japon, si tu étais un personnage de Manga, tu serais qui et pourquoi ? 

Sangoku

Ah ah ah. Ben je serais Sangoku, déjà parce que le personnage m’a suivi de mon enfance jusqu’à la fin de l’adolescence et a été presqu’un soutien moral pourrait-on dire. Et puis je pense qu’on partage le fait de vouloir progresser toujours plus loin et aussi de garder le sourire même après en avoir pris plein les dents.

 


 Plus sur le site du Japon

Voir le documentaire “Ce Japon qu’on aime tant” par Guillaume Tauveron.


 Liens

Site de Guillaume Tauveron

Facebook officiel de Guillaume Tauveron

 

 

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