Urashima Taro, conte célèbre du Japon

Alors que le soleil se couchait sur la baie, Urashima Taro rentrait chez lui après une longue, et éprouvante, journée de pêche, lorsqu’il se retrouva en face d’un groupe de jeune garçon qui était visiblement en train de jouer.

Attiré par le chahut, il s’approcha du groupe pour voir ce qu’il se passait lorsqu’il aperçut une pauvre petite tortue en train de se faire torturer. Pendant que deux des garçons la tenaient, un autre la frappait violemment avec un bâton, tandis que le quatrième garçon essayait de l’assommer avec une pierre.

Urashima était révulsé par la vision qui lui faisait face, et eu une compassion immédiate pour la tortue, il essaya d’intervenir :

 « Qu’est-ce que vous faites ?! Vous allez la tuer si vous continuez à la torturer ainsi ».

Les garçons, qui étaient tous à un âge où l’on semble prendre plaisir à être cruel avec les animaux continuèrent leurs actions comme si de rien n’était. Le plus âgé des garçons lui répondit cependant :

 « Qui cela dérange qu’elle vive ou pas ? On s’en fout. Allez les gars, continuez ! »

Ils remettaient les bouchées doubles à leur jeu pervers. Ne sachant que faire pour venir en aide à cette tortue, il demanda d’abord simplement, en souriant, qu’on lui donne la tortue.

« Je suis sûre que vous êtes des bons garçons ! Pourquoi ne pas me donner cette tortue ? J’aimerais tellement l’avoir. »

Mais les garçons ne l’entendaient pas ainsi : « Non, on ne te la donnera pas » dit un d’entre eux. « Pourquoi devrions-nous ? C’est nous qui l’avons attrapé. »

« C’est vrai » acquiesça Urashima, « Mais je ne vous demande pas de me la donner pour rien, je vous donnerai de l’agent en échange – en d’autres termes, laissez-moi vous l’acheter ? »  Il sortit un billet de sa poche et quelques pièces et poursuivit : «  Regardez les garçons, vous pouvez faire bien plus avec cet argent que vous pouvez faire avec cette pauvre tortue.»

Les garçons n’étaient pas des mauvais garçons, ils étaient seulement espiègles, et se laissèrent gagner par la proposition et le sourire d’Urashima. Ils finirent par s’approcher de lui tendant la tortue. « D’accord, ojisan, donne-nous l’argent et nous te donnerons la tortue ».

Et l’échange eut lieu, les garçons quittant les lieux rapidement, sûrement pour dépenser l’argent ainsi gagné.

Urashima caressa le dos de la tortue pendant qu’il dit : «  Oh pauvre bête ! Pauvre bête ! Tu es en sécurité maintenant. La cigogne vit mille ans, dit-on, mais la tortue vit 10.000 ans. Des êtres vivants, c’est bien toi qui a le plus long cycle, et tu t’es mis en danger en tombant entre les mains de garçons bien cruels. Par chance, je passais par là et fût capable de te sauver, mais désormais, alors que je m’apprête à te relâcher dans la mer, je ne serais plus là. Ne te fais plus capturer à l’avenir ou ton sort risquerait d’être scellé. »

Pendant qu’il lui faisait la morale, le gentil pêcheur marchait vers le large par-delà les rochers, puis posant la tortue dans la mer, il la regarda disparaître. Le soleil était couché, et il était fatigué de sa journée. Il rentra simplement chez lui, où ses parents l’attendaient.

Le lendemain, comme à son habitude Urashima partit vers le port. Le temps était clair et la mer était du bleu profond des matins d’été. Urashima monta sur son bateau, ouvrit les voiles et ainsi il se laissa voguer. Et une fois qu’il avait dépassé les filets de pêcheurs, il lança sa ligne. Son bateau s’éloignait toujours plus loin vers l’océan. Ignorant la raison, il se sentait étrangement bien ce matin-là  et pensant à la tortue de la veille et il se mit lui-même à espérer être aussi libre qu’elle l’était et avoir le droit de vivre 10.000 ans à la place de sa courte espérance de vie d’être humain.

Il fut soudainement sorti de sa rêverie en entendant son nom être appelé : « Urashima, Urashima ! » Clair comme le son d’une cloche et doux comme le vent d’été son nom flottait au-dessus de la mer.

Il se leva et observa dans chaque direction, pensant qu’un des bateaux de pêcheurs était finalement parvenu à sa hauteur mais regardant au-delà l’horizon, près ou loin, il n’y avait pas la moindre trace d’un bateau. La voix ne pouvait venir d’aucun être humain.

Désorienté, il n’arrivait pas à savoir qui l’avait appelé aussi distinctement. Il regarda autour de lui pour finalement apercevoir à côté du bateau une tortue.

« Madame Tortue » dit Urashima, « était-ce bien vous qui avez appelé mon nom ? »

La tortue secoua la tête plusieurs fois en signe d’acquiescement et dit :

« Oui, c’était bien moi. Hier dans votre honorable ombre ma vie fut sauvée. Et je suis venu ici pour vous remercier et pour vous dire ô combien je vous suis reconnaissant de votre gentillesse. »

« En effet. » Dit Urashima « c’est très poli de votre part de venir jusqu’à mon bateau pour cela. Je vous aurais bien offert une cigarette mais je me doute bien que les tortues ne fument pas » et la tortue de rire à sa blague.

« Ha ! » plaisanta la tortue, « le sake est mon rafraichissement favori mais en effet je ne fume pas. »

« Je vois » dit Urashima « Je regrette de ne pas avoir de sake à bord mais si vous voulez, vous pouvez monter à bord et sécher votre carapace, vous êtes le bienvenu, je sais que les tortues adorent cela. »

Ainsi, la tortue s’exécuta et avec l’aide du pêcheur grimpa sur le bateau. Après avoir échangé quelques banalités, elle poursuivit : « As-tu déjà vu Rin Gin, le palais du roi dragon de la mer, Urashima ? »

Le pêcheur fit signe que non et répondit : « Non, année après année, la mer a été ma maison, mais bien qu’ayant souvent entendu parler de ce palais sous la mer je n’ai jamais eu l’occasion de le voir. Il doit être très loin s’il existe vraiment ! »

« Vraiment ? Tu n’as jamais vu le palais du roi des mers ? Alors tu as raté une des choses les plus fabuleuses qu’il soit, il se trouve loin dans les profondeurs des mers mais si je te prends avec moi nous devrions être rapidement sur place. Et si tu veux découvrir le pays du roi des mers, je serais ton guide ».

« J’aimerais tellement y aller, et tu es vraiment gentil de proposer de me mener là-bas, mais tu dois te souvenir que je ne suis qu’un pauvre mortel incapable de nager contrairement à la créature des mers que tu es… »

« Ne t’inquiète pas, tu n’as pas besoin de nager jusque là-bas, si tu t’accroches à mon dos je pourrai t’y mener sans problème ».

« Mais comment est-il possible pour moi de voyager sur ce petit dos ? »

« Cela peut sembler absurde mais viens, essaie simplement, et tu verras que c’est possible. »

Alors que la tortue repartit dans l’eau, Urashima regarda sa carapace qu’il vit grossir, tant et si bien, qu’un homme pouvait désormais s’asseoir sur son dos.

« Incroyable ! » s’exclama Urashima Taro « Madame Tortue avec votre permission je monterais sur votre dos. Il s’exécuta et une fois en place il lança : « Allons-y ! ».

La tortue n’esquissa pas le moindre geste prouvant qu’il s’agissait pour elle d’une action anodine et elle s’enfonça immédiatement dans les profondeurs des mers. Et alors que le voyage se déroulait, et bien qu’ensevelit, les vêtements d’Urashima n’étaient pas mouillés et il ne ressentait aucune fatigue. Bientôt on put apercevoir une porte gigantesque et les toits d’un palais somptueux à l’horizon.

 « Wow ! » s’exclamait Urashima, visiblement ébahit par la beauté du spectacle qui s’offrait à lui, « On dirait la porte d’un grand palais ! Monsieur Tortue, pouvez-vous me dire où est ce que nous sommes ? »

“C’est la grande porte du palais de Rin Gin, le grand toit que vous voyez derrière la porte est le palais du Roi des mers”.

Urashima était heureux d’être arrivé jusqu’au royaume du Roi des mers. « Ne penses-tu pas que nous y sommes parvenus rapidement ? » dit  fièrement la tortue et elle poursuivit, « maintenant nous allons passer la porte, tu pourras bientôt marcher ».

La tortue prit les devants et s’adressa au gardien de la porte : « Voici Urashima Taro, venu d’un pays que l’on appelle Japon, j’ai l’honneur de l’amener comme visiteur du Royaume, pouvez-vous lui montrer le chemin ».

A ces mots les portes s’ouvrirent et le gardien de la porte, qui était un poisson, ouvrit la voie. Les vassaux du Roi des mers, la sole, les dorades, les seiches et poulpes, …,  se pressèrent pour saluer l’étranger.

« Urashima Sama ! Urashima Sama ! Bienvenue au palais des mers, la maison du Roi des mers. Tu es trois fois bienvenue, venue de si loin jusqu’ici » , puis se retournant « Suivez nous s’il vous plaît » et le banc de poisson devint tout entier son guide.

Urashima Taro visitant le palais du roi des mers, par Katsushika Hokusai.

Urashima n’étant qu’un pauvre pêcheur, il ignorait quelle était la bonne tenue dans un palais, mais, aussi étrange que cela puisse paraître il ne se sentait en rien embarrassé. Il se contentait de suivre ses gentils guides qui le conduisaient à l’intérieur du palais. Une fois la porte atteinte, une princesse à la beauté resplendissante, entourée de ses servantes, se tenait là pour lui souhaiter la bienvenue.

Elle était d’une beauté sans pareil dans le monde des Hommes. Elle était habillée de vêtements flottants de rouge et d’un vert délicat comme le revers des vagues. Ses longs cheveux noirs caressaient ses épaules à la manière d’une fille de roi des siècles précédents, et lorsqu’elle ouvrit la bouche ses mots résonnaient comme ceux d’une musique dans l’eau. Urashima, désarçonné par la splendeur de la princesse, comme perdu dans un monde de merveille, n’avait pas pu encore laisser échapper le moindre mot. Puis il se rappela qu’il était nécessaire de se courber pour saluer, mais avant qu’il puisse prendre cette initiative, la princesse lui prit la main et l’amena dans un autre hall où il put s’asseoir en hauteur comme pour l’honorer.

« Urashima, c’est avec un immense plaisir que nous t’accueillons dans le royaume de mon père » – dit la princesse. Elle poursuivit : « Hier, tu as libéré une tortue, et j’en ai envoyé une autre aujourd’hui pour te remercier de m’avoir sauvé la vie car j’étais cette tortue. Si tu le souhaites, tu peux rester vivre ici dans le pays de l’éternelle jeunesse où les étés ne se terminent jamais, et où les chagrins ne viennent pas, et je serais ta femme, et nous vivrons heureux».  

Et tandis qu’Urashima buvait les douces paroles de la princesse, et qu’il ne cessait d’admirer son joli visage, il lui répondit, se demandant si cela n’était pas qu’un rêve : « Merci mille fois pour ces mots. Il n’y a rien que je puisse espérer plus que de rester dans ce pays merveilleux avec vous. Ce pays dont j’ai tant entendu parler mais que je n’avais jamais vu avant aujourd’hui. C’est au-delà des mots, le plus merveilleux des lieux. »

Et pendant qu’ils étaient en train de parler déjà, un banc de poisson s’approchait, tous habillés en tenue de cérémonie. Ils entrèrent un par un silencieusement dans le hall, apportant des coraux, des plats, et des algues, et le festin fût célébrer au nom des jeunes mariés dans le faste et dans tout le royaume. Dès que les mariés se sont jurés amour en buvant le verre de sake, par trois fois, ( note: l’échange de trois verres de sake pour sceller le mariage est toujours en vigueur au Japon ) la musique fut lancée, et les chansons résonnèrent, et des poissons aux écailles d’argent et aux queues d’or, sautèrent par-dessus les vagues pour danser. Urashima s’amusait, jamais de toute sa vie il n’avait eu droit à une fête si merveilleuse.

Utagawa Kuniyoshi, 1847-1848, créatures marines faisant la fête à Urashima Taro.
Utagawa Kuniyoshi, 1847-1848, créatures marines faisant la fête à Urashima Taro.

Quand la fête fut terminée, la princesse demanda au marié s’il souhaitait aller se balader et découvrir toutes les merveilles du palais. Heureux, Urashima accepta de suivre sa femme, et toutes les splendeurs lui furent montrées, le palais lui-même était magnifique, fait de corail et décoré de perles. Mais plus beau que le palais lui-même, il y avait le jardin qui l’entourait. On pouvait y voir en une seule fois la beauté des différentes saisons.

Regardant à l’Est, il pouvait voir la pleine floraison des  cerisiers, les papillons allant de fleur en fleur et les oiseaux chantés sur l’ « avenue Rose ».

Regardant le sud, les arbres étaient verts comme ils le sont en plein cœur de l’été, et la journée les cigales, et la nuit les criquets s’exprimaient sans discontinuer.

Regardant à l’ouest, les pruniers de l’automne brillaient sous le coucher du soleil, et les chrysanthèmes étaient à leur état de perfection.

Regardant au nord, le sol était d’argent, recouvert de glace, les arbres et les bambous étaient couverts de neige, et l’étang présenter une légère couche solide.

Et jour après jour de nouvelles joies et de nouvelles merveilles entourées la vie d’Urashima, et sa joie était si intense, qu’il en avait oublié la maison d’où il venait, ses parents, et son pays. Trois jours passèrent avant qu’ils ne se rappellent à son devoir, et à ce qu’il était.

« Oh ! Je ne dois pas rester ici parce que j’ai un vieux père et une vieille mère à la maison. Qu’est ce qui a bien pu leur arriver depuis tout ce temps. Quelles angoisses ont-ils dû traverser ces derniers jours de me savoir disparu et sans nouvelle. Je dois rentrer aussi vite que possible. » Et il se prépara pour son voyage en toute hâte.

C’est alors qu’il alla voir sa femme, la princesse. Et se courbant aussi bas qu’il le pouvait, il dit :

« Je suis tellement heureux à tes côtés Otohime Sama, et tu as été tellement gentille avec moi en retour, que je n’ai pas de mot pour l’exprimer. Mais malheureusement je dois te dire au revoir car je me dois de retourner auprès de mes vieux parents ».

Otohime Sama était dévasté de l’apprendre, et d’une fois douce et triste, elle lui demanda s’il n’était pas bien ici, qu’il souhaitait la quitter aussi vite et elle lui demande d’au moins ne pas être pressé et de rester un jour de plus à ses côtés mais décidé, Urashima déclina l’offre et demanda à partir aussi vite que possible. Ses parents étaient vieux, et dans son pays le devoir est plus important que le plaisir.

« Je dois y aller. Ne pense pas que je souhaite te quitter. Ce n’est pas ça ! Je dois y aller, voir mes parents. Laisse-moi partir pour un jour, un seul et je serais de retour avec moi aussitôt. »

« Si c’est cela » répliqua la princesse, chagrinée « et qu’il n’y a rien d’autre à faire, je te renverrais chez toi aujourd’hui auprès de tes parents plutôt que de te garder avec moi un jour de plus et je te donnerai cette boîte comme un souvenir de notre amour. S’il te plaît prend là avec toi » – il s’agissait d’une magnifique boîte laquée traditionnelle, fermée par une corde en soie –

Urashima avait tellement reçu de cadeau de la princesse qu’il dit préalablement : « e n’est pas normal que te prenne un autre cadeau, alors que j’en ai reçu tellement mais puisque c’est ton désir alors je le ferais… Peux-tu me dire ce qu’il y a dans cette boîte ? »

« Il s’agit de la tamate-bako, et ce qu’elle contient est extrêmement précieux. Tu ne dois en aucun cas ouvrir cette boîte, quoiqu’il arrive. Si tu le fais un grand malheur te frappera. Promets-moi de ne pas l’ouvrir, promet moi ».

Après avoir promis à plusieurs reprises que jamais il n’ouvrirait la boîte, ils descendirent jusqu’aux extrémités du royaume de la mer en compagnie de la princesse et de ses suivants, jusqu’à rejoindre une grande tortue.

Tsukioka Yoshitoshi, 1886, Urashima Taro quittant le palais de la princesse.
Tsukioka Yoshitoshi, 1886, Urashima Taro quittant le palais de la princesse.

Il monta rapidement sur le dos de la créature, et fut porté par cette dernière jusqu’à l’horizon à l’Est. Il se tourna pour dire au revoir à sa femme, et resta ainsi jusqu’à perdre le contact visuel, et le royaume du roi des mers disparut lui aussi à l’horizon puis se retournant face à son pays, il commença à apercevoir des collines qui lui étaient familières.

La tortue le mena jusque dans la baie qu’il ne connaissait que trop bien, puis jusqu’au rivage où il descendit. Il regarda autour de lui tandis que la tortue faisait machine arrière.

Il fixait les gens qui passaient en face de lui, tandis que ces derniers faisaient de même. Il n’en reconnut aucun. La jetée était la même, la colline et la baie également mais les gens ne l’étaient pas.

Il se précipita vers sa maison pour annoncer son retour. Et bien qu’elle semblât différente, une maison se trouvait exactement au même emplacement. Alors, il appela : « Papa, je suis de retour ! » et il était sur le point d’entrer dans la maison lorsqu’un homme étranger en sortit.

« Peut-être que mes parents sont partis ailleurs ? » fut la première pensée d’Urashima, avant d’être gagné par une anxiété dont il ne connaissait la provenance.

« Excusez-moi ? » dit Urashima à l’homme qui le dévisageait « Jusqu’à il y a quelques jours je vivais ici avec mes parents, je m’appelle Urashima Taro. Savez-vous où sont partis mes parents ? »

Une étrange expression traversa le visage de l’homme, et scrutant intensément le visage d’Urashima il demanda : « Quoi ? Vous êtes Urashima Taro ? »

L’homme rigola lorsqu’Urashima lui affirma que c’était le cas. « Vous ne devez pas faire de mauvaises blagues, haha, c’est vrai qu’à une époque il y eut un pêcheur qui s’appelait Urashima Taro d’après les registres mais c’est une histoire vieille de plus de 300 ans ! Il ne peut pas être en vie. »

Effrayé d’entendre ses mots, Urashima poursuivit :

« S’il vous plaît, ne vous moquez pas, je suis réellement Urashima Taro, et je n’ai certainement pas vécu 300 ans. Il y a encore 4 ou 5 jours je vivais ici. Dites-moi s’il vous plaît juste ce que je souhaite savoir. »

Mais l’homme se fit plus grave :

« Vous pouvez être ou ne pas être Urashima Taro. Mais l’Urashima Taro duquel j’ai entendu parler a vécu il y a 300 ans. Peut-être êtes-vous son esprit de retour chez vous ? »

« Je ne suis pas un esprit! » Rétorqua Urashima, « regardez mes pieds » – et il frappa sur le sol d’abord avec un pied, puis avec le second pour prouver qu’il n’en était pas un. (Note : Au Japon les « esprits » n’ont pas de pied ).

« Tout ce que je sais c’est que l’Urashima Taro du village a vécu il y a 300 ans, c’est écrit dans les chroniques du village » insista l’homme qui ne pouvait pas croire l’histoire qu’il venait d’entendre.

Urashima était perdu. Il ne comprenait ce qu’il pouvait être advenu après seulement quelques jours, voir son monde qui avait tant changé. Il resta planté là, presque béat, regardant autour de lui. Quelque chose avait effectivement changé. Tout était différent de la condition dans laquelle il l’avait laissé. Il semblait vivre dans un rêve étrange. Les quelques jours qu’il avait passé dans le royaume du Roi des mers n’étaient pas des jours, mais des siècles. Ses parents étaient morts, et toutes les personnes qu’il connaissait avaient suivi le même chemin. Le village avait même écrit sa propre histoire. Il n’y avait pour lui plus aucune espèce d’utilité de rester ici. Son seul souhait était de retourner au palais, et de rester coulé des jours heureux auprès de sa femme.

Il retourna sur la plage, la boîte dans les mains, et il se demandait qu’elle fût le chemin du retour ? Il était tout à fait incapable de le retrouver seul. C’est là qu’il se rappela qu’il avait la Tamate bako avec lui.

La princesse m’a dit que je ne devais jamais ouvrir cette boîte lorsqu’elle me la donnait. Qu’elle contenait quelque chose de précieux. Mais maintenant que je n’ai plus de maison, que j’ai perdu tout ce qui comptait à mes yeux ici-bas, et que la tristesse s’est emparée de mon cœur, il me faut trouver un remède à ces malheurs. Si j’ouvre cette boîte, très certainement que je trouverai quelque chose qui m’aidera, quelque chose qui me montrera le chemin vers le pays du Roi des mers, et me permettra de rejoindre ma femme adorée. Il n’y a rien d’autre qui me tient maintenant. Oui, je vais ouvrir la boîte et regarder ce qu’il y a dedans, c’est ma seule solution.

Et ainsi son cœur accepta son acte de désobéissance, et il se persuada lui-même qui faisait la bonne chose en trahissant sa promesse.

Lentement, très lentement il délia la corde, lentement, intrigué, il fit glissait le socle de la boite. Et qu’est-ce qu’il y trouva ? Seulement un petit nuage violet s’échappa de la boîte. Pendant un instant il entoura le visage du pêcheur comme s’il ne voulait pas s’envoler, ce qu’il fît et s’évapora au-dessus de la mer.  

Urashima qui ressemblait jusqu’à présent ressemblait toujours à un jeune homme de vingt-quatre ans devint tout à coup très vieux. Son dos se courba, ses cheveux devinrent blancs comme neige, son visage s’amaigrit subitement et il tomba, mort, sur le sable.

Pauvre Urashima ! Parce qu’il a désobéi il ne pourra plus jamais retourner dans le royaume du roi des mers, ni auprès de la princesse aimée.

Morale.

Jeunes enfants, ne désobéissez pas à ceux qui sont plus sages que vous ou alors votre désobéissance sera le début de vos malheurs dans la vie.

En vidéo. On trouve dans le moyen métrage de Tick Tack movie, qui décrit exactement l’histoire que vous venez de lire. En japonais dans le texte. 

 

Histoire : 

Les premières versions de l’histoire d’Urashima Taro date de la période de Nara, soit le début du VIIIe siècle. Dans celle-ci, plutôt que visiter le palais du roi des mers, Urashima visite une terre nommée « Horai », qui est la terre des immortels dans la tradition chinoise et où vivent les ermites de la montagne, en compagnie de la princesse Otohime.

Ce comte a été décrété « conte japonais » dans un manuel scolaire à destination des enfants apparût en 1910, où 11 autres contes figures, dont Momotaro, par exemple. 

 

Autres versions :

Dans un livre autour de 1700, la tortue réapparaît, se transforme en princesse et ils se marient. C’est une histoire portant sur la gratitude, comme dans tsuru no ongaeshi et dans cette version, lorsqu’Urashima ouvre la boîte, il se transforme en grue, puis devient un kami et retrouve la princesse. 

Dans une autre version, la tortue qui est sauvé n’est pas une transformation de la princesse. Elle vient quelques jours après pour le remercier et ramener Urashima Taro dans le palais des mers. 

 

Chaque semaine, un nouveau conte japonais est disponible sur le site du Japon. Retrouvez ces contes ici [ marquez la page et jetez y un coup d’oeil occasionnellement si vous aimez les contes ]. 
 

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