Le jardin Japonais, d’aujourd’hui, né des influences shintoïstes attachées à l’amour de la Nature, et des influences bouddhistes, avec notamment l’image du paradis bouddhique, que les premiers jardins vont retranscrire. Mis à disposition du public, il existe quatre types de jardin japonais. Deux sont sujets à la promenade, les jardins de thé et les jardin-promenade. Deux sont destinés à être observé d’un point fixe à la manière d’une toile: les jardins de paradis et les jardins secs ou zen. Tous ont en commun de proposer la création d’un microcosme où les pierres, l’eau et les arbres se mêlent afin d’offrir un paysage miniaturisé, idéalisé et symbolique.
Le Jardin Japonais
L’art du Jardin n’a été introduit au Japon qu’au VIe – VIIe siècle de notre ère, vraisemblablement depuis la Chine ou depuis la Corée qui s’était elle-même inspiré du savoir faire chinois en la matière. C’est à la période de Nara que l’on voit les premières traces de jardin.
Importé de Chine et de Corée, l’art des jardins se japonise très vite. Les rochers et les étangs qui étaient sacrés dans le Japon d’alors, au moins un millénaire avant l’introduction de l’art du jardin, vont s’y intégrer. Le nihongi explique que dans les croyances populaires on considérait que les arbres, les plantes, et les pierres étaient autrefois doués de parole et de violence. Les premiers architectes de jardin japonais s’inspirent des croyances préalables pour familiariser leur création avec le public local. Ainsi, dès le commencement, les pierres, iwa kura, et les étangs, kami ike, deviennent un nécessaire à la construction du jardin japonais.
Des éléments du jardin japonais
Iwa Kura
Les iwa kura désignent des sièges rocher, ce sont des pierres qui sont considérées comme siège des esprits. Pour marquer leur respect, les Japonais entouraient ces pierres d’une corde, shimenawa, et ils procédaient à une purification du lieu en le nettoyant, puis plus tard en le recouvrant d’une couche de sable ou de gravier. L’aire ainsi constituée s’appelait kekkai, zone frontière, séparant le monde profane, de celui des kamis.
Tout d’abord, strictement lié à l’état naturel, les Iwa kura vont petit à petit bénéficier d’un travail humain visant à établir deux rochers côte à côte ou des cercles de pierre. Une des plus célèbres Iwakura en dehors d’un jardin est le Meoto Iwa dans la préfecture de Mie.
Kami Ike
Dans la croyance shintoïste, les étangs servent de demeure aux kamis. Source de vie, l’étang est profondément respecté. Il était ainsi déjà courant de transformer des espaces d’eau en lac sacré, sans pouvoir faire la distinction entre le travail de planification humaine, et celui naturel. Puis des îles étaient construites sur l’étang, l’île sacrée servant de demeure aux kamis. C’est de ces images de reproductions que s’inspirent les jardins japonais.
Étang sacré dans la nature, Source image – Onlynativejapan
L’île centrale.
L’île centrale des jardins étangs de l’époque Heian était reliée par des ponts de couleur vermillon qui servaient de passerelle entre le monde des hommes et celui des kamis qui siégeaient sur l’île.
Les premiers jardins au Japon.
D’abord l’œuvre d’un influenceur coréen, Michiko Takumi, en voyage au Japon, le premier jardin créé par un japonais le fut par Soga no Umako. La seconde “œuvre” sera attribuée au poète Otomo no Tabito qui aménagea un jardin avec son épouse.
Les différents types de jardin japonais
Jardin de promenade
Très prisé lors de l’ère Edo et initié par les daimyos, le jardin de promenade propose des perspectives à ses visiteurs. Tour à tour dévoilées ou cachées, dans ce type de jardin “la surprise doit pouvoir naître à chaque pas”.
Les trois grands jardins (三名園 ) du Japon sont dans ce style sont : le Korakuen à Okayama, le Kenrokuen à Kanazawa, le Kairakuen à Mito.
Initialement conçu à l’initiative des seigneurs féodaux pour leur propre relaxation, ils sont aujourd’hui pour la grande majorité d’entres eux propriété de l’été et ouvert au public.
le jardin de paradis
Le jardin de paradis évoque la terre pure bouddhiste. Ce type de jardin joue du paysage extérieur pour l’intégrer dans un ensemble global. Les pierres, disposées avec art créent l’illusion d’îles et de paysages rocheux. Ils s’observent d’un point fixe. Le jardin de paradis le plus célèbre du Japon est celui du Mōtsū-ji [毛越寺] à Hiraizumi, dans le Tohoku. Une cité antique qui avant d’être détruite par les forces du premier shogun Minamoto rivalisait, disait-on, de beauté avec Heian, la capitale impériale.
Source image Zekkei Japon
Les jardins purement japonais
Le jardin zen, ou jardin sec
Fortement attaché aux temples bouddhistes zen, ce type de jardin dispose avec soins de pierre dans une étendue de sable ratissée. Sa méthodologie, comme ses principes, sont mis en place par Soami.
Fondé sur les concepts de vide et de dépouillement, proche du bouddhisme Zen tel qu’il se développe dans le Japon du XVe siècle, il est une abstraction des choses de la Nature. Les traits dans le sable représentent la mer, pendant que d’autres objets recréent d’autres microcosmes sans pour autant les retranscrire pleinement. Un art impressionniste avant l’heure sous forme d’allégorie de la Nature qui continue d’émouvoir et de fasciner.
Au XVe siècle, en parallèle du développement du bouddhisme Zen, le jardin se redéfinit selon des critères fondamentalement japonais et apparaît finalement la création du premier jardin zen.
Le développement du Zen permet le Yugen, passage à la sobriété. De l’aristocratie au Zen, qui va être formalisé par le concept esthétique dit Yohaku nos bi – « beauté de l’extrême blancheur » – célébrant le dépouillement. L’idée du concept fait que l’esthétique est laissée en dehors de l’œuvre plutôt que dans celle-ci.
Le jardin du Ryoanji – 1499
Le jardin du Ryoan ji à Kyoto est le premier jardin zen du Japon. C’est Soami qui le met en place, définissant par l’idée du jardin zen, ou jardin sec. Il est célèbre pour sa composition de sable blanc et de ses 15 pierres, et se célèbre comme l’incarnation du bouddhisme Zen. Qu’importe la position choisit, il est impossible de voir toutes les pierres qui le composent. Objet de méditation et de supposition, le jardin répond au bouddhisme Zen et à ses énigmes : les kôan.
Le jardin de thé
Jardin composé d’un sentier, le roji “chemin de la rosée”, parfois en pierre, bordé de plantes taillées, il est le chemin qui mène du monde profane à celui de la cérémonie du thé traditionnelle.
A la suite de l’émergence du jardin sec, la cérémonie de thé va rechercher le Wabisabi. Sous la houlette de Sen no Rikyu, l’esthétisme le plus fondamental va être atteint et c’est ce dernier qui va être le garant de la cérémonie de thé jusqu’à aujourd’hui.
Le jardin de thé a à partir de Sen no Rikyu a pour fonction d’être une jonction entre le monde profane, à l’extérieur du portique d’entrée au jardin de thé, et le monde « sacré » de la cérémonie du thé.
Le roji (chemin vers la maison de thé).
Les maîtres de thé surnomment le jardin de thé, le roji, qui signifie le chemin. Le jardin est conçu dans la seule optique de permettre à l’invité le passage entre un monde de préoccupation mondaine et celui de la cérémonie du thé.
Ainsi, les espèces végétales qui sont sélectionnées dans le jardin appartiennent à la montagne, et les arbustes ne sont pas des arbres à fleur. Le jardin cherche à offrir le calme profond et la sérénité qui règne dans les forêts de montagne sans distraire le visiteur de quelques fleurs.
Au milieu règne un chemin, véritable essence de création de l’architecte, fait de pierre qui permet de se frayer un passage au milieu du zoki. Certains éléments, comme les pas de pierre, tobi ishi, et les lanternes en pierre, ishi doro, furent ajoutés d’abord dans l’optique de copier les cours de temple puis créer dans la seule utilisation des roji. Ils furent utilisés pour la première fois par les maîtres de thé au XVIème siècle.
Le parcours de thé doit reproduire le parcours de la ville à la cabane d’un ermite en miniature.
- La porte d’entrée.
- Les toilettes.
- Le banc d’attente, permettant de contempler et de se préparer à la cérémonie.
- La chumon, ou porte intermédiaire.
- La fosse à déchet. Chiriana.
- Bassin aux ablutions, tsukubai.
- Puits, ido.
- Pavillon de thé, soan.
Selon les recommandations de Sen no Rikyu « le roji idéal contient six parts de parcours pour 4 de paysage ».
Pénétrer dans l’espace de la cérémonie revêt une compartimentation des étapes. Une fois la porte d’entrée ouverte, venant de la rue, ou d’un jardin plus grand, le dernier des invités se doit de la refermer. C’est la première étape de séparation avec le monde de l’extérieur. Ici, l’invité doit se laisser pénétrer par l’esprit de la cérémonie à venir. A cet effet, un banc d’attente est mis à disposition. Ce banc permet de voir le passage des saisons, et de prendre patience. Une végétation environnante retranscrit les saisons si besoin était.
Lorsque votre hôte vient vous cherchez, il s’incline, et vous en faites de même. Avant de passer une seconde porte, la porte médiane, ici se trouve le chiri ana qui est une fosse, dans laquelle vous devez, symboliquement, laissés vos soucis pour pouvoir pénétrer pleinement l’atmosphère de la cérémonie.
Avant de parvenir à l’espace de la cérémonie du thé, une dernière porte basse, nijiri guchi, qui vous oblige à vous baisser doit être traversé. C’est là que les samurai étaient contraints de déposer leurs armes et d’être l’égal des autres à l’intérieur du soan, à une époque de stricte différenciation entre les classes sociales.
Bien qu’avant lui, de grands jardiniers se soient attelés à définir ce qu’était l’art du thé, et l’art de son jardin, c’est sous Sen no Rikyu que ce dernier a été finalisé et qui demeure aujourd’hui comme l’exemple à suivre. Afin de définir la nature véritable du jardin de thé, ce conte explique comment le jardin doit être traité.
Sen no Rikyu et son disciple.Le disciple en effet prenait sa tâche très à cœur, et il nettoyait chaque centimètre du jardin avec une précision et une ténacité importante mais à chaque fois qu’il demandait au maître si cela convenait ? Le maître répondait que c’était loin d’être parfait. Après plusieurs jours du même serment, le maître finalement s’attela à montrer ce qui n’allait pas à son disciple. D’un geste assuré il remua avec vigueur les branches des arbres, les feuilles d’automne, d’un rouge étincelant, tombèrent sur le roji, à la lueur dorée. Le maître s’en félicita et dit : Les feuilles de chênes Le roji est en effet, si petit soit-il, doit permettre d’arriver à la cabane d’un ermite via un chemin montagneux. Du monde profane, au monde de la voie du thé. Ainsi est la fonction du jardin de thé. |
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Si j’avais ce genre de jardin chez moi j’aurais l’impression, à chaque fois que je m’éveille, d’entrer dans un nouveau rêve. C’est vraiment magnifique…
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